Il s'agissait d'un chantier titanesque et très novateur avec des techniques audacieuses. Environ 14 millions de m3 de terre ont été compactés dans les règles de l'art pour réaliser une prouesse de construction, un barrage de terre, le barrage de Serre-Ponçon. Aujourd'hui, c'est l’un des plus grands barrages hydroélectriques européen en terre. Il impressionne par son ampleur : 123 m de haut, 600 m de large et 650 m d'épaisseur pour contenir un lac de 1 270 millions de m3 d'eau ! Le Durance, rivière au caractère alpestre, impétueuse, instable, changeante, ange et démon à la fois, a suscité l'imaginaire des gens du coin. Considérée à l'époque avec le Mistral et le Parlement comme un des fléaux de la Provence. La dompter devint nécessaire afin d'assurer un développement économique indispensable pour la région. Associés à l'hydroélectricité, l'irrigation des terres agricoles de la Basse Durance, la lutte contre les crues, le développement économique, et plus tard l'acheminement de l'eau potable à Marseille furent les moteurs de la prise de décision. Néanmoins le développement économique ne s'est pas déroulé de manière homogène. Ce dernier a été plus favorable aux Alpes de Haute-Provence et aux départements extra-alpins qu'au département des Hautes-Alpes. Cette décision maintes fois repoussée pour des raisons géologiques et de compétences a certes exigé une prouesse technique mais aussi humaine. Plus de 3000 ouvriers participèrent à ce chantier pharaonique, des ouvriers venus de toutes parts attirés par des salaires 5 fois supérieurs à la moyenne. Ces hommes allaient devoir travailler dans des conditions extrêmement difficiles pendant 6 ans, de mai 1955 à juin 1960, voire davantage pour ceux qui contribuèrent à la construction du nouveau village de Savines-Le-Lac, l'ancien ayant été noyé car situé sous la côte 780. Pour des facilités de logistique, les ouvriers furent logés à proximité du chantier. Des logements ont donc été construits sur la commune d'Espinasse, la commune où se trouve justement la retenue. On y observe une architecture post seconde guerre mondiale, fortement imprégnée de béton qui, laissée à l'abandon, subit les agressions du temps, les assauts de la végétation et des visites particulières. Essayez d'imaginer le repos en ces lieux rendus bruyants par la ronde incessante des Euclids, ces gigantesques engins de 85 T chargés d'argile et de graviers destinés à l'immense barrage. Attention où vous mettez les pieds !